Guillaume Marie Angenard (1776-1837), malouin, capitaine et corsaire de l’Empire, a écrit ses Mémoires. Il effectue entre 1817 et 1833 neuf voyages vers l’île Bourbon et l’Île de France avec des équipages de onze à seize hommes pour transporter des passagers et des marchandises. Sur trois bateaux différents dont la Bonne Mère en 1826-27-28. Venant de Marseille, il passe à l’île Maurice anglaise, il est l’acteur d’un épisode tout à fait particulier.
Il raconte : » En creusant la terre aux environs du palais du gouvernement, , des Noirs trouvèrent, du 26 au 27 décembre, un cercueil de plomb renfermant les restes de Mme de La Bourdonnaye et de son enfant. Ce cercueil fut revêtu d’une forte caisse de bois de natte et transporté dans le choeur de l’église de Port Louis, où il fut déposé. Le jour de la translation, je fis mettre mes vergues en croix et hisser à mi-mât tout ce que j’avais à bord de pavillons. Ayant appris que ces dépouilles mortelles devaient être portées par des nègres, j’allai trouver le gouverneur anglais et je revendiquai cet honneur pour mon équipage, qui ,luirais-je remarquer, apportenait ainsi que moi et mon navire, au pays natal de Mme de La Bourdonnaye. Cette faveur me fut accordée, quoique l’usage de l’île s’y opposât, et ce précieux fardeau fut porté par huit matelots de la Bonne Mère, vêtus de blanc. Mes officiers, mes maîtres et moi, formions la tête du convoi. La cérémonie de translation se fit avec la plus grande décence et avec le plus grand recueillement. La plus grande partie des habitants de l’île et des régiments anglais qui se trouvaient au port accompagnaient le cortège. Quantité de vieux nègres et de vieilles négresses, qui se rappelaient les bienfaits de cette famille à jamais vénérée dans l’île, suivaient aussi le cercueil en pleurant et les sanglots fendaient le coeur. «
Source : Alain ROMAN Saint-Malo, ses activités maritimes à travers le monde XVIe-XIXe siècle, Edition Cristel SAINT-MALO, collection les dossiers de la SHAASM. p.111-112. ISBN 978-2-84421-178-1.